La doctrine de « non-emploi en premier », pilier de la stratégie nucléaire chinoise et outil de diplomatie globale

Depuis lapparition de larme nucléaire, les grandes puissances ont dû ajuster leurs stratégies pour sadapter à un monde de plus en plus complexe et instable. Trois approches principales ont émergé au fil du temps : la dissuasion, la frappe préemptive et le non-emploi en premier (NFU – No First Use).

Ces doctrines définissent en gros les règles du jeu nucléaire. La dissuasion repose sur une logique simple : « Si tu me frappes, je te frappe en retour, et tout le monde perd. » Ce concept, connu sous le nom de destruction mutuelle assurée (MAD – Mutual Assured Destruction), a dicté les relations stratégiques pendant la guerre froide, notamment entre les États-Unis et lUnion soviétique.

Puis est apparue la doctrine de la frappe préemptive. Ici, lidée est de ne pas attendre quun ennemi frappe en premier. Si une menace sérieuse est perçue, certaines puissances considèrent quil vaut mieux frapper avant que le danger ne devienne incontrôlable. Cest une posture controversée, bien sûr, mais certains États estiment quelle est nécessaire pour protéger leur sécurité nationale.

Enfin, il y a le non-emploi en premier (NFU). Cette doctrine est un engagement : « Nous nutiliserons jamais nos armes nucléaires les premiers, quel que soit le type d’attaque contre nous. » Son objectif est clair : réduire les risques descalade et éviter une guerre nucléaire par accident. Peu de puissances nucléaires ont officiellement adopté le NFU. Parmi elles, on trouve la Chine et lInde à titre unilatéral et la Russie avec la Chine à titre bilatéral. Cependant, ce choix stratégique est souvent accueilli avec scepticisme. Les États-Unis, par exemple, mais surtout leurs alliés, sinquiètent que cela puisse affaiblir leur dissuasion, y compris la dissuasion élargie (le « parapluie nucléaire ») en cas de crise majeure et d’attaque conventionnelle d’un ennemi.

Dans le contexte actuel, où les tensions internationales ne cessent de croître, cette doctrine prend un sens encore plus crucial. LAsie de lEst, avec ses conflits autour de Taïwan et la mer de Chine méridionale, ou encore la menace permanente de la Corée du Nord, est un véritable foyer dinstabilité. Le Moyen-Orient nest pas en reste, avec les rivalités persistantes entre lIran et Israël, seule puissance nucléaire de la région, sans oublier les interventions des grandes puissances comme les États-Unis, la Russie, et la Chine. Ces régions sont des terrains fertiles pour les malentendus stratégiques, où un mauvais calcul pourrait rapidement dégénérer et une guerre conventionnelle déboucher sur une guerre nucléaire catastrophique.

Cest là que le NFU peut faire la différence. En sengageant à ne jamais être le premier à utiliser larme nucléaire, un État envoie un signal de retenue, rassurant ses voisins et la communauté internationale. Cela permet de faire baisser la pression et de limiter les risques dun conflit nucléaire, intentionnel ou non. Dans un monde où chaque décision peut avoir des conséquences irréversibles, cette doctrine représente un effort concret pour maintenir une certaine stabilité.

Une doctrine présentée comme défensive

La doctrine du non-emploi en premier (NFU) de la Chine a vu le jour en 1964, juste après son premier essai nucléaire. Dès le départ, la Chine a déclaré quelle ne serait jamais la première à utiliser larme nucléaire, quelles que soient les circonstances. Contrairement aux États-Unis et à la Russie, qui se sont réservé une certaine flexibilité stratégique, la Chine a choisi une position claire et intransigeante. Depuis, cette doctrine est devenue un pilier central de sa stratégie nucléaire.

Ladoption de cette posture sinscrit dans le contexte tendu de la guerre froide, une époque où la course aux armements battait son plein et où les superpuissances accumulaient les têtes nucléaires. En choisissant le NFU, la Chine cherchait à se démarquer. Elle voulait envoyer un message : « Nos armes nucléaires, en quantité minimale, visent à dissuader une attaque nucléaire contre nous, mais nous n’entendons pas déclencher une guerre nucléaire. » Cette doctrine a permis à Pékin de présenter son arsenal comme un bouclier plutôt quune épée, un outil destiné uniquement à dissuader toute tentative de coercition ou de chantage nucléaire.

Avec le temps, le NFU est devenu un élément clé de la sécurité nationale chinoise. Dans un environnement international de plus en plus tendu, notamment avec les rivalités en Asie de lEst autour de Taïwan ou en mer de Chine méridionale, cette doctrine joue un rôle crucial. Mais ce nest pas seulement sur le plan militaire que le NFU a de limportance. Sur le front diplomatique, la Chine lutilise comme un levier dans des forums internationaux comme les cinq membres permanents du Conseil de sécurité reconnus comme puissances nucléaires « officielles » (P5) ou le Forum sur la coopération sino-africaine (FOCAC), se positionnant comme un champion de la paix et du désarmement.

Cela dit, tout le monde ne voit pas cette doctrine dun bon œil. Les États-Unis et la Russie, de même que la France et le Royaume-Uni, restent sceptiques. Ils perçoivent souvent le NFU comme un outil de communication déclaratoire plus quun véritable engagement. Cette méfiance est exacerbée par la modernisation et l’accroissement rapide de larsenal chinois, ce qui donne limpression que Pékin veut à la fois projeter une image de retenue tout en augmentant sa capacité nucléaire en dépassant la posture classique de dissuasion minimale.

Le rôle croissant de la Chine en Afrique ajoute une autre couche à cette dynamique. En promouvant le non-emploi en premier et le désarmement nucléaire lors de sommets comme le FOCAC, Pékin renforce ses partenariats avec les pays africains et améliore son image de partenaire fiable et pacifique. Mais cela soulève une question importante : cette stratégie est-elle sincère, ou sagit-il simplement dune tentative daccroître son influence sous couvert de bonnes intentions ?

Au final, la doctrine NFU est un outil stratégique polyvalent pour la Chine. Elle sert à rassurer ses partenaires, à dissuader ses adversaires et à se positionner comme un acteur majeur dans les discussions mondiales sur la sécurité et le désarmement. Toutefois, son efficacité dépendra de la capacité de Pékin à prouver que ses intentions sont aussi pacifiques quelle le prétend.

Principes de la doctrine du NFU de la Chine

La Chine est entrée dans le cercle très fermé des puissances nucléaires le 16 octobre 1964, avec son premier essai nucléaire réussi et a d’emblée choisi une posture défensive claire fondée sur le non-emploi en premier. Ce moment a été un véritable tournant stratégique pour le pays, qui possédait désormais larme la plus destructrice jamais conçue. Face aux États-Unis et à lUnion soviétique qui se livraient une course à larmement sans merci, la Chine a conçu larme nucléaire comme une question de survie. Après le conflit frontalier avec lInde en 1962 et des tensions grandissantes avec lUnion soviétique, Pékin devait renforcer sa sécurité nationale. Mais il ne sagissait pas seulement de se protéger. Détenir larme nucléaire permettait à la Chine de briser le monopole des deux superpuissances et daffirmer son indépendance stratégique sur la scène mondiale. Mao Zedong voyait cette arme non pas comme un instrument dattaque, mais comme un moyen ultime de dissuasion face à toute tentative de coercition.

Ce qui a distingué la Chine des autres puissances nucléaires dès le départ est quelle a adopté une doctrine de non-emploi en premier. Ce choix avait un double objectif : projeter une image de puissance responsable et rassurer la communauté internationale (surtout les pays non-alignés qu’elle cherchait à séduire), mais aussi freiner la course aux armements et prévenir tout risque descalade nucléaire. Au fil des années, cette doctrine est devenue un pilier de la stratégie de défense chinoise. Contrairement aux États-Unis ou à la Russie, qui ont progressivement intégré des options de frappe préemptive dans leurs doctrines, la Chine a maintenu une posture strictement défensive. Sous la direction de Xi Jinping, cette doctrine a été réaffirmée comme un élément essentiel de la diplomatie et de la stratégie militaire du pays. Lors de discours internationaux, comme à Genève en 2017, Xi Jinping a qualifié les armes nucléaires d’« épée de Damoclès suspendue au-dessus de lhumanité », plaidant pour leur élimination. En 2022, lors dune réunion du P5, la Chine a proposé un traité multilatéral sur le NFU.

La doctrine NFU repose sur plusieurs engagements. Premièrement, la Chine promet de ne jamais utiliser ses armes nucléaires en premier, même en cas de conflit conventionnel, avec lidée de réduire ainsi les risques dune escalade incontrôlée. Deuxièmement, Pékin garantit quelle nutilisera jamais ses armes nucléaires contre des pays non dotés ou des zones exemptes darmes nucléaires, renforçant ainsi la sécurité des États non-nucléaires et soutenant les efforts de désarmement, notamment en Afrique et au Moyen-Orient. Enfin, la Chine milite activement pour un traité multilatéral sur le NFU et pour la réduction des arsenaux nucléaires dans le cadre du Traité de non-prolifération (TNP).

Mais cette posture soulève des interrogations, surtout dans un contexte de modernisation et d’accroissement rapide de larsenal nucléaire chinois. Le développement de nouveaux missiles balistiques intercontinentaux (ICBM) et de sous-marins lanceurs dengins suscite des inquiétudes, certains experts redoutant que ces avancées ne signalent une réévaluation de la doctrine NFU, au moment même où les tensions augmentent en Asie-Pacifique.

Dans le cadre de la modernisation de son arsenal nucléaire, la Chine a clairement renforcé ses capacités stratégiques avec des missiles comme le DF-4. Ce missile balistique intercontinental, qui peut atteindre des cibles à plus de 5 500 kilomètres, a été conçu pour couvrir des régions stratégiques, notamment lensemble du territoire américain et russe. Et ce nest pas tout : Pékin développe également des systèmes encore plus avancés, comme le DF-41, qui offre une portée de plus de 11000km et des capacités MIRV (des ogives multiples pouvant frapper différentes cibles indépendamment). Inévitablement, ces avancées inquiètent les États-Unis et la Russie. Ces puissances y voient non seulement une montée en puissance technologique, mais aussi une tentative de redéfinir l’équilibre des forces. En gros, pour ces puissances, la modernisation chinoise vient semer le doute sur la sincérité du non-emploi en premier, en laissant planer le soupçon que cette posture pourrait évoluer vers une approche plus flexible, voire offensive appuyées sur des capacités de première frappe. C’est ainsi que l’administration Biden a fait évoluer la doctrine stratégique américaine en y intégrant le scénario d’une menace combinée russo-chinoise.

En résumé, la doctrine NFU reste un pilier central de la stratégie de dissuasion de la Chine, conçue pour projeter une image de retenue et de responsabilité. Mais, dans un monde où les équilibres stratégiques sont de plus en plus précaires, la Chine devra convaincre ses partenaires et ses rivaux de la sincérité de ses engagements si elle veut contribuer durablement à la stabilité internationale.

La stratégie chinoise du NFU dans les relations internationales

En tant que membre du P5, la Chine occupe une place de choix dans les discussions sur la sécurité nucléaire mondiale. Ce statut de membre permanent du Conseil de sécurité de lONU, couplé à son rôle de puissance nucléaire reconnue par le Traité de non-prolifération (TNP), lui confère un positionnement stratégique unique..

Depuis des années, la Chine sefforce de convaincre les autres membres du P5 dadopter une politique similaire. Lors des réunions du P5, elle pousse à la signature dun traité multilatéral sur le NFU ou, au minimum, à une déclaration conjointe. Lobjectif est clair : établir une règle de conduite commune pour éviter les malentendus stratégiques ou, pire, une escalade accidentelle qui pourrait conduire à un conflit nucléaire. On peut imaginer une situation où un mauvais geste ou une mauvaise interprétation pourrait déclencher un carnage. La Chine veut mettre des règles sur la table, des règles qui imposeraient à tous de ne pas dégainer en premier.

Un moment marquant dans cette campagne a eu lieu le 4 septembre 2024, lors de lAssemblée générale des Nations Unies. Ce jour-là, la Chine a renouvelé son appel à un traité NFU entre les membres du P5. Mais Pékin ne sest pas contenté de paroles : elle a aussi intensifié sa coopération régionale, notamment avec lAfrique. Lors du Sommet Chine-Afrique de 2024, une déclaration conjointe a été signée avec 53 pays africains, témoignant de lambition chinoise de dépasser les cercles traditionnels du P5 pour promouvoir le désarmement à l’échelle mondiale. Cet engagement avec lAfrique est un exemple clair de la manière dont la Chine utilise le NFU comme un outil diplomatique pour étendre son influence.

En 2024, la Chine a même saisi l’occasion de sa présidence tournante du processus P5, jouant un rôle de médiateur dans les discussions sur la réduction des risques nucléaires. Ce positionnement reflète une ambition de leadership croissante dans les affaires de sécurité internationale. Pékin voit dans la doctrine NFU un levier puissant pour renforcer la stabilité stratégique et faciliter le désarmement. En effet, si toutes les puissances nucléaires renonçaient à l’emploi en premier et adaptaient en conséquence leurs arsenaux pour en éliminer les armes de première frappe, le risque d’une guerre nucléaire serait considérablement réduit et les puissances nucléaires pourraient amorcer les négociations de désarmement sans la crainte de se retrouver menacées par les autres.

Pourtant, malgré ces efforts, des fractures profondes demeurent au sein du P5. Les États-Unis et la Russie, notamment, sont loin d’être convaincus. Washington, par exemple, défend avec ferveur la nécessité de maintenir une « flexibilité stratégique ». Selon les États-Unis, face à des menaces imprévisibles comme celles de la Corée du Nord ou de lIran, renoncer à une première frappe affaiblirait leur capacité de dissuasion y compris vis-à-vis de leurs alliés. Les présidents Obama et Biden étaient personnellement favorables à l’adoption du NFU (ou plutôt du « sole purpose », réduisant le rôle des armes nucléaires à la seule dissuasion d’une frappe nucléaire). Mais certains alliés de l’OTAN ainsi que le Japon et la Corée du Sud ont exprimé leur crainte que Washington renonce à les défendre en cas d’attaque conventionnelle et, finalement, les États-Unis ont décidé de garder toutes leurs options sur la table.

La Russie, de son côté, adopte une posture plus ambiguë. Bien quelle soutienne certaines initiatives de désarmement, Moscou continue de préserver la possibilité de mener une frappe nucléaire préemptive si ses intérêts vitaux sont menacés, y compris par des attaques conventionnelles majeures, à ne pas confondre avec la frappe préventive, en effet la frappe préemption répond à une menace imminente, tandis que la frappe préventive consiste à éliminer une menace potentielle avant qu’elle ne devienne immédiate. Cela reflète les préoccupations persistantes de la Russie face à la supériorité conventionnelle et à lexpansion de lOTAN et aux tensions croissantes en Europe de lEst. Ces divergences mettent en lumière un problème fondamental : là où la Chine prône une dissuasion défensive stricte, les doctrines américaine et russe considèrent la première frappe comme un pilier essentiel de l’équilibre stratégique. Ce n’est que dans un cadre bilatéral avec la Chine que la Russie a accepté le NFU. En fin de compte, ces différences ralentissent considérablement les progrès vers un consensus international sur le NFU.

Malgré tout, sur la scène internationale, la Chine sefforce de se présenter comme une puissance responsable et engagée en faveur de la paix. Sa doctrine NFU, unique parmi les membres du P5, est devenue un outil diplomatique majeur. Elle permet à Pékin de se distinguer des doctrines plus agressives des États-Unis et de la Russie, qui semblent parfois prêtes à frapper en premier. En parallèle, la Chine sappuie sur des initiatives régionales pour renforcer son message.

En Afrique, par exemple, elle soutient activement la création de zones exemptes darmes nucléaires (ZEAN) telles le Traité de Pelindaba, qui interdit depuis 2009 la possession darmes nucléaires sur le continent africain ; ce soutien permet à la Chine de renforcer son image de puissance pacifique et de s’assurer que des zones sensibles comme l’Afrique restent exemptes d’armes nucléaires, ce qui réduit les risques de prolifération compromettant ses intérêts économiques et sécuritaires. Lors du sommet FOCAC de 2024, Pékin a même renforcé son engagement en proposant la création de zones similaires au Moyen-Orient, montrant ainsi son ambition d’élargir ce modèle à dautres régions stratégiques du monde. Lors de ce Sommet, Pékin a aussi réaffirmé son engagement envers le NFU et a encouragé les autres puissances nucléaires à adopter des politiques similaires.

Ces efforts sinscrivent dans une stratégie plus large visant à renforcer linfluence chinoise dans les forums multilatéraux. En promouvant des initiatives comme le NFU, la Chine cherche à simposer comme un acteur clé des discussions sur la non-prolifération, tout en consolidant son rôle de garant de la sécurité collective. Bien sûr, tout nest pas rose : Pékin reste critiquée pour dautres aspects de sa politique étrangère, notamment en mer de Chine méridionale ou à Taïwan. Mais en dépit de ces critiques, la doctrine NFU reste un pilier central de sa stratégie. Elle permet à la Chine de projeter une image de retenue et de responsabilité, tout en affirmant son rôle dans un ordre international en pleine transformation.

En dépit des résistances au sein du P5, Pékin persiste. Elle continue de défendre activement la doctrine NFU, espérant réduire les tensions globales et démontrer quun monde moins armé est un monde plus sûr. Mais pour convaincre, elle devra prouver que ses engagements ne sont pas que des mots et quelle est prête à mener par lexemple dans la quête dune stabilité internationale durable.

La stratégie chinoise du NFU en Afrique

Les relations entre la Chine et lAfrique, bien que profondément enracinées dans lhistoire, ont pris une tournure stratégique au début des années 2000, lorsque la Chine a émergé comme une puissance économique mondiale. Ce partenariat sest structuré autour du Forum sur la Coopération Sino-Africaine (FOCAC), lancé en 2000. Ce forum, qui pourrait être comparé à une grande table de négociation familiale où chacun apporte ses besoins et ses atouts, est devenu la pierre angulaire des échanges entre les deux parties. Si, à ses débuts, la relation se concentrait principalement sur l’économie, elle sest progressivement transformée en une alliance stratégique incluant des volets politiques et sécuritaires.

LAfrique joue un rôle fondamental dans la stratégie chinoise. Économiquement, le continent regorge de matières premières essentielles comme les minéraux rares, le pétrole et le gaz naturel. Ces ressources sont le carburant dont la Chine a besoin pour maintenir son impressionnante machine industrielle. Mais Pékin ne se contente pas de piller les richesses africaines. En échange, elle investit lourdement dans l’agriculture et les infrastructures : routes, chemins de fer, ports et réseaux électriques, etc., en amenant souvent les pays bénéficiaires à s’endetter massivement et à devenir donc dépendants de la Chine. Cette dynamique ne profite pas seulement aux économies locales, mais elle ancre également Pékin dans le tissu économique du continent, tout en lui offrant un vaste marché pour écouler ses produits manufacturés, souvent en concurrence avec les productions locales.

Sur le plan diplomatique, lAfrique est pour la Chine un allié de poids dans les forums multilatéraux, en particulier à lONU, où les votes africains peuvent faire pencher la balance sur des questions cruciales ou pour élire des Chinois à des postes clés. Ce soutien est particulièrement précieux lorsque la Chine cherche à promouvoir ses positions sur la sécurité internationale ou la non-prolifération nucléaire. Ici, Pékin joue un jeu subtil : renforcer ses partenariats avec des nations qui, bien que plus petites, apportent une légitimité et un soutien collectif à ses initiatives globales.

Cest dans ce cadre que la doctrine chinoise du non-emploi en premier prend tout son sens en Afrique. En promouvant cette posture sur le continent africain, la Chine cherche à se présenter comme une puissance pacifique, à lopposé des grandes puissances occidentales, dont les interventions militaires sont souvent perçues comme arrogantes ou intrusives. Contrairement à ces dernières, Pékin se positionne comme un partenaire respectueux des souverainetés nationales, utilisant les sommets du FOCAC pour réitérer son soutien à des initiatives de désarmement.

Les motivations chinoises pour promouvoir le NFU en Afrique sont multiples. Sur le plan économique, maintenir des relations stables avec les pays africains garantit un accès fluide aux ressources naturelles tout en créant des débouchés pour les produits manufacturés chinois. Sur le plan sécuritaire, la stabilité régionale est essentielle pour préserver les intérêts chinois. Pékin voit dans le désarmement une manière datténuer les tensions transfrontalières et de prévenir les conflits, en jouant le rôle dun arbitre qui propose des solutions pacifiques. Enfin, sur le plan diplomatique, le NFU est un outil de soft power. En le promouvant, la Chine améliore son image de puissance responsable, tout en consolidant ses alliances avec les pays en développement face aux critiques souvent acerbes des puissances occidentales.

Les initiatives chinoises en Afrique sinscrivent dans une stratégie multilatérale bien huilée. Pékin soutient activement les opérations de maintien de la paix de l’ONU et de l’Union africaine et promeut des initiatives régionales de désarmement, se positionnant ainsi comme un acteur clé dans la résolution des crises africaines. Cette approche renforce non seulement sa légitimité sur la scène internationale, mais consolide également son influence sur le continent. En somme, la doctrine NFU en Afrique incarne une vision globale qui mêle ambitions économiques, sécuritaires et diplomatiques. À travers ces actions, la Chine cherche à établir un modèle de coopération durable, fondé sur la stabilité et la prévention des conflits, tout en affirmant son rôle de leader dans un ordre mondial en mutation.

En fin de compte, la doctrine NFU reste un pilier fondamental de la stratégie de dissuasion défensive chinoise. Si elle était appliquée de manière cohérente, elle pourrait jouer un rôle crucial dans la promotion de la stabilité régionale et mondiale. Mais pour dissiper les doutes et renforcer la confiance internationale, la Chine devra faire preuve de transparence accrue sur ses capacités nucléaires. En dautres termes, elle devra montrer quelle est prête à passer des paroles aux actes, prouvant ainsi quelle est véritablement engagée en faveur de la paix et du désarmement.

 

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