La première rencontre entre le président Biden depuis son élection et son homologue russe à Genève le 16 juin a au moins eu le mérite de se tenir, et cela quelques mois après la décision des deux pays de proroger de cinq ans leur traité New START sur la limitation des armements nucléaires offensifs déployés. Les attentes quant aux résultats étaient modestes compte tenu des tensions et des différends entre Moscou et Washington.
IDN se félicite toutefois que, dans une déclaration conjointe, les deux présidents aient consenti à réaffirmer le principe proclamé par leurs prédécesseurs Reagan et Gorbatchev selon lequel « une guerre nucléaire ne peut être gagnée et ne doit donc pas être menée ». C’est sur cette base qu’ils sont convenus de lancer un nouveau processus « intégré de dialogue sur la stabilité stratégique » afin de poser les jalons de futures mesures de contrôle des armements et de réduction du risque nucléaire.
Le cadre du sommet ne permettait pas d’entrer dans le détail. C’est pourquoi il incombera aux diplomates et aux experts des deux pays de discuter à brève échéance du calendrier, du lieu et de l’ordre du jour de ces négociations. C’est évidemment ce dernier, à savoir les catégories d’armes ou de systèmes à inclure dans ces mesures, qui sera le plus difficile. En effet, les Etats-Unis entendent élargir un accord aux armes non-stratégiques (ou tactiques, notamment déployées en Europe en plus grand nombre par la Russie) et aux armes « exotiques » développées par la Russie (missiles hypersoniques ou à propulsion nucléaire, torpilles nucléaires) tandis que la Russie veut y inclure les systèmes défensifs et les capacités stratégiques non-nucléaires qu’ils considèrent comme déstabilisants.
On est encore loin des promesses d’Obama d’un monde libéré des armes nucléaires. Le concept de stabilité stratégique, on le sait, signifie le maintien d’une capacité de riposte nucléaire en cas de première frappe, qui constitue le fondement de la prétendue dissuasion. La Russie (tout comme la Chine) est obsédée par ce qu’elle perçoit comme une volonté délibérée des Etats-Unis d’affaiblir cette capacité de riposte qui encouragerait une première frappe. Tout ce qui pourra aller dans le sens d’un abaissement du seuil d’emploi des armes nucléaires ne peut être que bienvenu. Il restera à voir si Biden est prêt à aller plus loin dans cette voie en faisant évoluer la doctrine américaine vers le « non-emploi en premier ». Si c’était le cas et si la Russie lui emboitait le pas, les perspectives de réduction des arsenaux ne pourraient qu’en être facilitées.