IDN se réjouit des déclarations lucides et courageuses faites le 24 novembre dernier par le Pape François à Hiroshima et Nagasaki.
Dans ces deux villes victimes de l’arme nucléaire, le Pape a réaffirmé les positions de l’Église catholique condamnant l’emploi de cette arme. Il y a également renouvelé la condamnation de la possession, et plus seulement de la menace d’emploi, de l’arme nucléaire, qu’il avait prononcée à Rome le 10 novembre 2017.
Lors de la rencontre pour la paix d’Hiroshima, il a clairement qualifié « l’utilisation de l’énergie nucléaire à des fins militaires » de « crime, non seulement contre l’homme et sa dignité, mais aussi contre toute possibilité d’avenir dans notre maison commune », ajoutant que « nous aurons à en répondre ; les nouvelles générations se lèveront en juges de notre défaite si nous nous contentons de parler de paix … en construisant de nouvelles et redoutables armes de guerre ».
Le Pape a ainsi su, pratiquement seul parmi les acteurs de la scène internationale, dénoncer l’hypocrisie des dirigeants qui parlent de paix tout en développant une stratégie de dissuasion fondée sur la terreur et la défiance mutuelle. Il a ainsi eu le courage de demander « Comment pouvons-nous proposer la paix si nous utilisons l’intimidation de la guerre nucléaire comme recours légitime pour résoudre les conflits ? ».
Lors de son message sur les armes nucléaires, prononcé le même jour à Nagasaki, il a plus explicitement encore dénoncé la stratégie de dissuasion nucléaire : cette stratégie prétend répondre au désir de paix et de stabilité présent dans toutes les sociétés humaines par un discours de « fausse sécurité, soutenu par une mentalité de peur et de défiance ». Or, « la paix et la stabilité internationales sont incompatibles avec toute démarche fondée sur la peur de la destruction réciproque ou sur une menace d’anéantissement total ». « Elles ne sont possibles qu’à partir d’une éthique globale de solidarité et de coopération ».
Le Pape a alors appelé à une démarche collective et concertée de tous les acteurs pour « briser la dynamique actuelle de défiance qui fait courir le risque d’un démantèlement de l’architecture internationale de contrôle des armements ». Il a souligné que « l’érosion du multilatéralisme à laquelle nous assistons est encore aggravée par le développement des nouvelles technologies d’armement ».
Il a conclu en affirmant qu’un « monde sans armes nucléaires est possible et nécessaire » à condition que les dirigeants des États « n’oublient pas que ces armes ne nous défendent pas contre les menaces nationales et internationales de notre temps ». Ils doivent en revanche tenir compte de trois éléments : les effets catastrophiques de tout emploi de l’arme nucléaire sur l’humanité et l’environnement, le climat d’hostilité créé par les doctrines nucléaires, le gaspillage de ressources indispensables au développement durable.
Il a alors appelé à une « conversion des consciences » refusant la logique de la dissuasion nucléaire en faveur d’une « culture de la vie, de la réconciliation et de la fraternité ».
Ces paroles dépassent la simple indignation ou exhortation morale. C’est un appel à l’action de tous, et en particulier les États pour qu’ils s’engagent dans la voie collective et progressive du désarmement nucléaire complet et contrôlé, notamment en s’inscrivant dans la démarche d’abolition prévue par le nouveau traité d’interdiction des armes nucléaires.